Votée solennellement le 31 janvier 2023 par les députés, la loi destinée à effacer les obstacles administratifs et réglementaires au déploiement des éoliennes et des centrales solaires va créer un nouvel objet juridique : l’observatoire de la biodiversité et des énergies renouvelables. Si la grande majorité des associations de défense de l’environnement sont partisanes des énergies renouvelables, ce n’est pas à n’importe quel prix. Or, contentieux il y a, surtout sur les parcs éoliens. Les pales tuent de nombreux oiseaux. Combien ? Depuis les années 1990 et les premières installations d’éoliennes, la Ligue de protection des oiseaux (LPO) tente de quantifier le nombre de volatiles et de chiroptères touchés ainsi que les espèces concernées. Conclusion : “Ce sont les parcs les plus anciens qui sont les plus meurtriers, tout simplement parce qu’ils ne sont pas implantés aux bons endroits”, affirme Geoffroy Marx, en charge du dossier à la LPO.
Entre la fin des années 1990 et 2015, les adhérents de la LPO ont mené près de 38.000 visites de parcs éoliens situés sur l’ensemble du territoire national, sachant cependant que 60% du parc français se situe dans les Hauts-de-France, en Champagne-Ardenne et en Occitanie. La LPO a par ailleurs étudié 197 constats réalisés sous 1065 mâts de 142 parcs. Les données sont hétérogènes et souvent entachées de biais méthodologiques, concernant notamment la période exacte où l’oiseau a été tué ainsi que la rigueur de l’inspection sur des espaces relativement vastes. “La mortalité réelle, c’est-à-dire le constat sans ambiguïté d’une collision qui a pu être datée, n’a pu être établie que pour huit parcs seulement”, regrette Geoffroy Marx. En moyenne, donc, une éolienne tue sept oiseaux par an, ce qui correspond aux résultats enregistrés aux Etats-Unis et au Canada. Mais la moyenne cache une grande disparité. Pour les huit parcs, la mortalité varie de moins d’un oiseau tué par an à plus de 18 !
Les parcs éoliens les plus anciens sont les plus meurtriers
Qu’est-ce qui explique cette différence ? L’emplacement. “Les premiers parcs ont été installés là où les vents sont les plus forts et les plus réguliers et le plus loin possible des habitations, poursuit Geoffroy Marx. Et cela correspond aux zones humides et aux sites Natura 2000 protégés notamment à cause de la présence de l’avifaune”. L’éventail des victimes est large : 97 espèces ont été recensées. Mais si les membres de la LPO s’attendaient à retrouver une majorité de gros oiseaux comme les rapaces, ce sont les passereaux qui constituent 60% de la mortalité, avec en tête le roitelet à trois bandes. L’étude des périodes d’accidents montre une forte prédominance de la migration, principalement celle d’automne. “De grandes nuées d’oiseaux partent de nuit, quand les éoliennes sont invisibles par eux”, explique Geoffroy Marx. Les éoliennes situées à moins de 1 kilomètre des zones de protection spéciale (ZPS) tuent pour 72% des espèces qui sont protégées. Ces espaces-là n’ont pas été mis sous protection pour rien.
Cela ne signifie pas que les rapaces ne sont pas affectés. Aigles royaux, milans noirs, faucons crécerelles sont moins nombreux à être retrouvés au pied des mâts, mais l’impact est bien plus important. “Ils ne sont pas touchés en période de migration mais pendant la nidification, ce qui détruit l’individu et sa descendance”, déplore Geoffroy Marx. Leurs effectifs sont par ailleurs bien moindres que ceux des passereaux. C’est mathématique : si les passereaux ont le plus grand nombre de victimes, c’est parce qu’ils sont les plus nombreux. Même constat avec les chauve-souris. La pipistrelle est la plus affectée car c’est la plus commune de nos chiroptères.
Votée solennellement le 31 janvier 2023 par les députés, la loi destinée à effacer les obstacles administratifs et réglementaires au déploiement des éoliennes et des centrales solaires va créer un nouvel objet juridique : l’observatoire de la biodiversité et des énergies renouvelables. Si la grande majorité des associations de défense de l’environnement sont partisanes des énergies renouvelables, ce n’est pas à n’importe quel prix. Or, contentieux il y a, surtout sur les parcs éoliens. Les pales tuent de nombreux oiseaux. Combien ? Depuis les années 1990 et les premières installations d’éoliennes, la Ligue de protection des oiseaux (LPO) tente de quantifier le nombre de volatiles et de chiroptères touchés ainsi que les espèces concernées. Conclusion : “Ce sont les parcs les plus anciens qui sont les plus meurtriers, tout simplement parce qu’ils ne sont pas implantés aux bons endroits”, affirme Geoffroy Marx, en charge du dossier à la LPO.
Entre la fin des années 1990 et 2015, les adhérents de la LPO ont mené près de 38.000 visites de parcs éoliens situés sur l’ensemble du territoire national, sachant cependant que 60% du parc français se situe dans les Hauts-de-France, en Champagne-Ardenne et en Occitanie. La LPO a par ailleurs étudié 197 constats réalisés sous 1065 mâts de 142 parcs. Les données sont hétérogènes et souvent entachées de biais méthodologiques, concernant notamment la période exacte où l’oiseau a été tué ainsi que la rigueur de l’inspection sur des espaces relativement vastes. “La mortalité réelle, c’est-à-dire le constat sans ambiguïté d’une collision qui a pu être datée, n’a pu être établie que pour huit parcs seulement”, regrette Geoffroy Marx. En moyenne, donc, une éolienne tue sept oiseaux par an, ce qui correspond aux résultats enregistrés aux Etats-Unis et au Canada. Mais la moyenne cache une grande disparité. Pour les huit parcs, la mortalité varie de moins d’un oiseau tué par an à plus de 18 !
Les parcs éoliens les plus anciens sont les plus meurtriers
Qu’est-ce qui explique cette différence ? L’emplacement. “Les premiers parcs ont été installés là où les vents sont les plus forts et les plus réguliers et le plus loin possible des habitations, poursuit Geoffroy Marx. Et cela correspond aux zones humides et aux sites Natura 2000 protégés notamment à cause de la présence de l’avifaune”. L’éventail des victimes est large : 97 espèces ont été recensées. Mais si les membres de la LPO s’attendaient à retrouver une majorité de gros oiseaux comme les rapaces, ce sont les passereaux qui constituent 60% de la mortalité, avec en tête le roitelet à trois bandes. L’étude des périodes d’accidents montre une forte prédominance de la migration, principalement celle d’automne. “De grandes nuées d’oiseaux partent de nuit, quand les éoliennes sont invisibles par eux”, explique Geoffroy Marx. Les éoliennes situées à moins de 1 kilomètre des zones de protection spéciale (ZPS) tuent pour 72% des espèces qui sont protégées. Ces espaces-là n’ont pas été mis sous protection pour rien.
Cela ne signifie pas que les rapaces ne sont pas affectés. Aigles royaux, milans noirs, faucons crécerelles sont moins nombreux à être retrouvés au pied des mâts, mais l’impact est bien plus important. “Ils ne sont pas touchés en période de migration mais pendant la nidification, ce qui détruit l’individu et sa descendance”, déplore Geoffroy Marx. Leurs effectifs sont par ailleurs bien moindres que ceux des passereaux. C’est mathématique : si les passereaux ont le plus grand nombre de victimes, c’est parce qu’ils sont les plus nombreux. Même constat avec les chauve-souris. La pipistrelle est la plus affectée car c’est la plus commune de nos chiroptères.
Un parc éolien devrait bientôt être démantelé en France à cause de son impact sur les oiseaux
La LPO le constate : les parcs les plus récents sont les moins meurtriers. Le contentieux porte donc sur les premières installations. Il y a des exceptions. Le parc de Bernagues, dans l’Hérault, a été construit en 2016 seulement et pourtant, il est implanté à proximité de zones de nidification d’aigles royaux et de vautours fauves. Deux de ces oiseaux ont été tués en 2017 et 2022. Accordé dans un premier temps, le permis de construire a depuis été annulé mais les éoliennes ont été construites. Elles sont donc illégales et devraient être démolies, la Cour de Cassation venant de donner raison aux opposants en janvier 2023. Pour la première fois en France, des éoliennes devraient être démontées à cause de leurs atteintes à la biodiversité. Dans l’Aude, c’est un développeur de projet important, Valorem, qui a réclamé à la LPO plus d’un million d’euros pour avoir contesté la construction d’un parc éolien à proximité d’une ZPS. Selon la ligue, le parc a été autorisé il y a dix ans après une étude d’impact “lacunaire”.
C’est pour éviter ce type de conflits que le législateur a créé un observatoire, dont les contours seront déterminés par décret dans les prochains mois. La LPO espère bien faire partie du comité de pilotage. “Un tel observatoire existe pour l’éolien en mer, mais rien n’existait au niveau terrestre et c’est donc une lacune qui vient d’être comblée”, rappelle Jérôme Mousset, directeur Bioéconomie et Energies renouvelables à l’Ademe, qui pourrait piloter la nouvelle structure. Même satisfaction du côté du Syndicat des énergies renouvelables (SER). “C’est une bonne nouvelle car nous avons besoin d’objectiver l’impact de nos installations pour pouvoir avoir un débat constructif sur ces questions avec les associations environnementales“, estime Alexandre Roesch, délégué général du SER. Une partie des problèmes pourrait d’ailleurs être résolue par des solutions techniques : caméra infrarouge de détection des oiseaux commandant l’arrêt des machines, pales peintes en noir pour être rendues plus visibles testées en Norvège, mise à l’arrêt des éoliennes lors des phases de migration, effaroucheurs…
Quand la lutte contre le changement climatique affecte la biodiversité
L’éolien devrait occuper l’essentiel de l’activité de la nouvelle structure. Mais le photovoltaïque n’est pas non plus exempt de tout reproche. Selon une étude de la LPO, “lorsqu’elles sont implantées sur des toitures existantes ou sur des surfaces imperméabilisées (parking, tarmac, etc.), les centrales solaires photovoltaïques (CPV) sont réputées engendrer peu ou pas d’impacts sur la biodiversité en phase de construction, d’exploitation et de démantèlement. Ces projets doivent donc de fait être encouragés en priorité.” En revanche, les centrales au sol occupant des milieux naturels sont vivement critiquées. Ce cas de figure arrive principalement dans la forêt landaise, où les panneaux occupent les espaces où les pins ont été exploités. La loi qui vient d’être votée interdit donc strictement les demandes de construire des parcs photovoltaïques sur ces espaces, au grand dam de la profession qui fait remarquer que les permis de construire restent possibles pour des routes ou des lotissements également dommageables pour la biodiversité. “Il ne faudrait pas oublier que la troisième cause de disparition de la biodiversité, c’est le changement climatique, rappelle Alexandre Roesch. Les énergies renouvelables sont justement là pour participer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.”
Les débats devraient donc être vifs au sein de cet observatoire qui ne sera pas créé ex nihilo. L’Ademe, les associations de défense de l’environnement et l’Office français de la biodiversité (OFB) ont déjà créé un centre de ressources qui compile toutes les études publiées sur le sujet partout dans le monde. Par ailleurs, la LPO et l’Ademe animent conjointement le site EnR et Biodiversité. L’observatoire sera ainsi le centre de destination de toutes les données qui seront enregistrées autour des parcs existants et à construire. Car selon la dernière programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) couvrant la période 2023-2028 (mais qui doit être révisée en 2023 pour tenir compte des nouveaux objectifs européens), la puissance installée de l’éolien terrestre doit passer de 24 gigawatts cette année (soit 8000 mâts en activité) à 33-34 gigawatts en 2028. Pour atteindre l’objectif de 2028, il faudra en ajouter environ 6000. Autant anticiper de potentiels conflits.