Dans cette étude, les scientifiques ont demandé à deux groupes de participants d’effectuer un exercice sur ordinateur. “La consigne était de s’approcher de visages en colère et d’éviter les visages heureux, ce qui est le contraire de ce que nous sommes naturellement enclins à faire et nécessite un contrôle des émotions pour surmonter des tendances émotionnelles automatiques”, résume l’auteur auprès de Sciences et Avenir.
Pendant ce test, l’équipe de recherche a enregistré l’activité cérébrale des participants grâce à une IRM et, comme ils s’y attendaient, celle-ci variait en fonction de l’anxiété des personnes. Plus surprenant encore, ces choix sociaux entraînaient l’activation de régions tout à fait différentes.
Comment le cerveau réagit-il à l’anxiété ?
En temps normal, le contrôle des émotions engage la partie la plus frontale du cerveau, le cortex préfrontal antérieur. Il interagit à la fois avec l’amygdale, impliquée dans les émotions et le stress, et le cortex moteur, associé aux actions. “Nous pensons que le rôle de cette région frontale du cerveau est de combiner les informations émotionnelles avec les objectifs que l’on veut atteindre et les règles comportementales que l’on doit suivre pour contrôler efficacement nos actions”, analyse Bob Bramson.
Cependant, chez les personnes anxieuses, c’est une autre région du cortex préfrontal qui doit assumer ce rôle “probablement parce que la partie la plus antérieure, impliquée en temps normal, est surchargée de réponses émotionnelles”, ajoute-t-il. Cette région est située un peu plus vers le haut et l’arrière du cerveau. On l’appelle cortex préfrontal dorsolatéral. Celui-ci est moins apte à combiner des informations émotionnelles et des informations relatives à un objectif. C’est pourquoi les personnes anxieuses auraient plus de mal à réguler leur comportement émotionnel, en particulier dans des circonstances sociales. Mais comment l’anxiété induit-elle un dysfonctionnement du cortex préfrontal antérieur ?
“Cette région est surexcitable chez les personnes anxieuses et présente des connexions plus fortes avec les zones du cerveau souvent associées aux émotions et aux réactions au stress, telles que l’amygdale”, indique Bob Bramson. Les personnes anxieuses recevraient donc une “surdose d’informations” dans le cortex préfrontal antérieur, entraînant un dysfonctionnement de celui-ci.
L’équilibre risque-récompense
“Imaginez que vous êtes invité à une fête à laquelle vous ne connaissez personne”, illustre le chercheur. “Les personnes les moins anxieuses arrivent à surmonter leur peur des autres et de leur réaction, car elles associent également quelque chose d’agréable à ce type d’événement, de l’amusement par exemple. C’est ce qui leur permet d’intégrer qu’il n’y a pas à craindre ce genre de situation.” A l’inverse, l’anxiété pousse d’autres personnes à éviter ces fêtes, ce qui entretient, selon les auteurs, leur peur et leur comportement d’évitement.
Des choix comme celui-ci exigent en effet un équilibre entre les notions de risque et de récompense. Mais l’activation d’une région cérébrale ou d’une autre influe sur notre décision, ce qui explique les différences de comportements en fonction de l’anxiété des participants.
Ces résultats éclairent les difficultés liées aux troubles anxieux et pourraient influer sur notre façon de les traiter. Une précédente étude du même groupe de chercheurs montrait que les stimulations électriques du cerveau amélioraient le contrôle des émotions chez les personnes anxieuses. “Ces derniers résultats pourraient nous aider à créer un traitement mieux adapté à leur fonctionnement cérébral, en ciblant directement les régions cérébrales impliquées”, conclut Bob Bramson.