“Jusqu’à quelle altitude un oiseau peut-il voler ? Peut-il même voler dans l’espace ?”, nous demande Zephyr Cocoazur sur notre page Facebook. C’est notre question de la semaine. Merci à toutes et à tous pour votre participation.
La physique au service des oiseaux
Commençons par le début : comment volent les oiseaux ? Après tout, ils sont, au même titre que nous les humains, soumis aux lois de la gravité qui nous clouent au sol. La réponse se trouve dans la forme de leurs membres. Lors de l’envol, les ailes s’abaissent sous le corps de l’animal. Cette action permet la compression de l’air sous l’oiseau : c’est la poussée. Grâce à cela, il peut décoller du sol, et être maintenu vers le haut et vers l’avant. La deuxième étape se déroule une fois qu’il a pris suffisamment de vitesse. Une force perpendiculaire va alors s’opposer à lui : c’est la portance. L’air s’écoule en suivant la forme de ses ailes et glisse sous les plumes, ce qui lui permet de continuer de voler et de planer. L’application de ces deux forces physiques soutient l’oiseau et contre temporairement la gravité.
Donc, il faut de l’air pour voler. Et cet air, on le trouve à 90% dans la troposphère (nom de la première couche de l’atmosphère terrestre) qui s’étend de 6 à 20 kilomètres au-dessus de nos têtes. Ce qui implique une première limite d’altitude pour nos oiseaux : jamais ils ne pourront dépasser les 20.000 mètres de haut et donc atteindre la deuxième couche, la stratosphère (connue notamment pour sa couche d’ozone) qui s’étend de 20 km à 40 km. Et encore moins l’espace !
La majorité des oiseaux ne dépasse pas les 1500 mètres de haut
Maintenant que les principes du vol sont éclaircis, entrons dans le vif du sujet : l’altitude record. La majorité des oiseaux ne volent pas plus haut que 1500 mètres, tout simplement parce qu’ils n’en ont pas besoin. A ces altitudes, des flux d’air (ascendants ou descendants) leur permettent de se déplacer sans effort. Ils peuvent également y trouver leurs sources de nourritures (que ce soit des insectes, d’autres oiseaux, des poissons ou des mammifères terrestres, qu’ils repèrent grâce à leur vision acérée) ou permettre une surveillance globale de leurs territoires.
Mais qu’en est-il des oiseaux nichant sur les flancs hostiles des plateaux tibétains ? Ou des oiseaux migrateurs ? Il est vrai que des grues cendrées (Grus grus) passent régulièrement au-dessus de l’Himalaya, soit 8849 mètres au point culminant lors de leur long périple. Elles atteignent 10.000 mètres de hauteur pour plusieurs raisons : éviter la prédation des aigles sévissant plus bas, les vents violents soufflant entre les cols des montagnes, la déshydratation et l’hyperthermie causée par l’effort fourni. Il en va de même pour d’autres espèces comme les oies tigrées (Anser indicus) qui volent à 8900 mètres ou les cygnes chanteurs (Cygnus cygnus) enregistrés à 8200 mètres, d’après les ouvrages Animal Records du zoologiste britannique Mark Carwardine (The Natural History Museum, 2013) et Migration of birds de l’ornithologue américain Frederick C. Lincoln (University Press of the Pacific, 2005).
Le vautour de Rüppell, l’oiseau qui détient le record d’altitude
Cependant, ce ne sont ni les grues, ni les oies, ni les cygnes les détenteurs du record réel d’altitude de vol. Il s’agit d’une espèce de vautour : le vautour de Rüppell (Gys ruppellii). Il vit habituellement dans la région du Sahel, en Afrique, mais s’observe également dans le sud de l’Europe. Un individu a été retrouvé en train de planer à 11.300 mètres le 29 novembre 1973 au-dessus d’Abidjan, la capitale de la Côte d’Ivoire, et a malheureusement percuté un avion de ligne, provoquant la destruction d’un moteur. Les chercheurs ne comprennent pas très bien la raison pour laquelle cet animal est monté si haut.
Un autre record, théorique cette fois-ci, a été enregistré par des scientifiques sur la Cordillère des Andes. En étudiant les capacités physiques des colibris (Selasphorus rufus), ils se sont aperçus qu’en condition de laboratoire, ces minuscules oiseaux supportaient parfaitement les contraintes atmosphériques correspondant à des hauteurs de plus de 11 000 mètres (à cette altitude, il n’y a plus d’oxygène disponible). Néanmoins, ils n’ont jamais pu démontrer la présence de ces animaux à de telles altitudes dans le milieu naturel, du fait qu’ils n’ont certainement pas besoin d’aller aussi haut dans le ciel pour vivre.