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Faut-il craindre le risque sanitaire ? · Inserm, La science pour la santé

by admin
Faut-il craindre le risque sanitaire ? · Inserm, La science pour la santé

Doit-on redouter les prochains Jeux olympiques et paralympiques sur le plan sanitaire ? La question mérite d’être posée alors que cet évènement va réunir en France des millions de personnes qui arriveront des quatre coins du monde. Trois spécialistes de la surveillance sanitaire font le point sur les risques à prendre en compte.

Un article à retrouver dans le magazine de l’Inserm n°59

Du 26 juillet au 8 septembre 2024, les Jeux olympiques et paralympiques attireront jusqu’à 15 millions de visiteurs en France, en plus des milliers d’athlètes, de volontaires ou encore de journalistes… Des zones de très forte affluence sont prévues : les sites olympiques mais aussi le lieu de la cérémonie d’ouverture, les fan zones un peu partout en France, le club de France à la Villette à Paris… Autre facteur à prendre en compte, de nombreux visiteurs viendront de l’étranger. Ils en profiteront pour concilier Jeux et tourisme, et pourront potentiellement importer des maladies de zones endémiques et favoriser leur dispersion. Plusieurs types de risques sanitaires sont donc envisagés, notamment la canicule et le risque infectieux. Autorités de santé et acteurs de la surveillance et des soins se préparent à toutes les éventualités.

Marie Bâville : De très nombreux scénarios sont anticipés

Les risques susceptibles de survenir lors des Jeux olympiques ont été recensés et hiérarchisés dans le cadre d’une analyse réalisée par l’ensemble des acteurs nationaux. Sur le plan sanitaire, nous anticipons notamment une possible canicule à cette période de l’annexe ainsi que la diffusion d’agents infectieux au regard des flux touristiques attendus. Les risques infectieux les plus probables sont les intoxications alimentaires collectives compte tenu des regroupements et des consommations sur place, les maladies transmises par les moustiques (dengue, Zika, chikungunya), les infections respiratoires aiguës dont la Covid-19 et les maladies à surveillance obligatoire comme les méningites, la rougeole, la diphtérie. À ce jour il n’y a toutefois pas de motif d’inquiétude ni de signe d’alerte particulier.

Néanmoins, nous restons prudents et nous nous organisons pour parer à toutes les éventualités car le brassage de milliers d’individus pourrait favoriser les transmissions. Nos outils de surveillance permettent de suivre de façon rapprochée l’état sanitaire de la population et de détecter d’éventuels signaux faibles. En outre, la direction générale de la Santé prépare, en lien avec les agences sanitaires et les acteurs territoriaux, les dispositifs et moyens de réponse pour faire face à toutes les situations sanitaires exceptionnelles. De très nombreux scénarios sont anticipés. En cas de menace, l’objectif sera d’informer rapidement le grand public sur les mesures de protection éventuelles à prendre et d’organiser la montée en puissance du système de santé et l’orientation des patients vers les filières de prise en charge adaptées. La sécurité sanitaire constitue un enjeu majeur pour les Jeux olympiques.

Marie Bâville est sous-directrice de la veille et de la sécurité sanitaire à la direction générale de la Santé.

Dominique Costagliola : Un risque d’augmentation de rapports sexuels non protégés

Parmi les risques infectieux, il y a ceux liés à la santé sexuelle. Or des millions de personnes sont attendues pour cette manifestation sportive mais aussi festive. Il n’est pas exclu que dans ce contexte d’échanges, il y ait davantage de rapports sexuels improvisés et non protégés. Ce risque est difficile à évaluer car nous ne connaissons pas précisément le profil des visiteurs lors de cet événement. Il semble que le public sera majoritairement familial mais il y aura aussi certainement un grand nombre de personnes qui seront là pour se retrouver et faire la fête. Et si les risques d’infection au VIH concernent davantage les hommes ayant des relations sexuelles avec les hommes, la surveillance effectuée par Santé publique France montre que les autres populations ne sont pas épargnées. Il y a en outre les infections bactériennes à Chlamydia trachomatis et à gonocoque, ou encore la syphilis. Le risque infectieux en cas de rapports non protégés peut donc concerner tout le monde.

Sur le terrain, il faudra se préparer à l’éventualité d’une augmentation des situations d’urgence pour des prescriptions de traitement post-exposition contre le VIH ou de dépistages d’infections sexuellement transmissibles. Cela impactera les services d’urgence. Or, on sait qu’ils rencontrent régulièrement des difficultés organisationnelles l’été. Il y a aussi heureusement les centres de santé sexuelle et les Centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic des infections sexuellement transmissibles et des hépatites virales (CeGIDD). Toutefois, il serait utile de prévoir pendant cette période une communication accrue sur le traitement post-exposition contre le VIH et de faciliter l’accès gratuit aux préservatifs.

Dominique Costagliola est directrice de recherche émérite Inserm à l’Institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique, Grand Prix Inserm 2020.

Pierre-Yves Boëlle : Surveiller pour détecter les signaux à bas bruit

Un risque de flambée épidémique paraît peu probable lors des Jeux olympiques. L’été est peu propice aux épidémies virales et la population française, qui représentera l’essentiel des spectateurs, possède globalement une bonne couverture vaccinale contre les maladies usuelles. La possibilité de résurgence de virus de type variole du singe ne peut cependant pas être écartée. Pour cela, le travail des autorités sanitaires consistera à accentuer la surveillance pendant la durée des Jeux dans le but de détecter un signal à bas bruit – c’est-à-dire des cas d’infections peu nombreux mais susceptibles d’annoncer un foyer infectieux – afin d’intervenir rapidement. Plusieurs systèmes de surveillance seront mis à contribution, dont le réseau Sentinelles que nous coordonnons, qui collecte des données auprès des médecins généralistes pour une dizaine de maladies de type infections respiratoires aiguës, diarrhées aiguës…

Nous aurons la possibilité de concentrer l’analyse des données sur les sites sur lesquels se déroulent les Jeux et de fournir des résultats plus réguliers qu’à l’accoutumée. Cela permettra de faire ressortir d’éventuelles altérations du signal. Nous l’avions fait pendant la Coupe du monde de football en 1998 sans cependant constater quoi que ce soit d’anormal. Il y a d’autres réseaux de cliniciens ou encore de laboratoires d’analyse, par exemple pour suivre les maladies vectorielles, les méningites, les infections sexuellement transmissibles bactériennes… Une vigilance accrue devra être portée sur l’activité des centres d’urgence ou des structures comme SOS médecins, qui sont les plus à même de voir des cas de maladies infectieuses sévères d’évolution rapide.

Pierre-Yves Boëlle est directeur de recherche Inserm à l’institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique.

Propos recueillis par A. R.

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